vendredi 29 juillet 2016

Une guerre pas totale contre le terrorisme

C'est devenu une antienne, tout serait fait dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, pourtant,
d'assez nombreux exemples illustrent (et ce blog a déjà livré quelques uns) le fait que cette lutte est loin d'être totale (il est donc difficile de parler de "guerre" si on ne s'en donne pas les moyens pour la gagner). Pour des motifs parfois difficile à comprendre. En voici quelques uns, dans trois ministères différents engagés dans la lutte.
Douane
La douane vient par exemple de décider de supprimer sa composante avions dédiée aux opérations aéroterrestres. Cette flotte (comportant avions et hélicoptères) a pourtant déjà contribué aux opérations de la DGSI (qui ne dispose pas d'avions), et avait fait connaître sa disponibilité pour les opérations de recherche des frères Kouachi, en janvier 2015. Sans être déclenchée, alors que cette composante était la mieux placée (elle est basée au nord de Paris). Un fait étonnant resté apparemment inconnu de la commission d'enquête sur les attentats de 2015 qui a pourtant ratissé large. On peut penser que tout le monde sur le pont dans ce genre de situations, pourtant, donc, la logique de tuyau d'orgues prévaut donc encore.
En parallèle, la Douane vient de commencer l'expérimentation du HK UMP pour mieux protéger ses dispositifs volants, seulement armés, jusqu'à maintenant, d'un simple SIG 2022. Le résultat de l'expérimentation ne devrait être connu qu'à la fin de l'année.
Intérieur
Les unités spécialisées dans le contre-terrorisme sont en manque de véhicules pour leur logistique et pour les interventions (blindés), alors même que le ministère de l'Intérieur a décidé de créer, au printemps trois antennes RAID et autant d'antennes GIGN. C'est le déficit capacitaire le plus évident, même si on en trouve aussi dans d'autres domaines.
Même si les opérateurs de ces unités ne sont pas frappés de médaillite aigüe, on peut aussi constater que les interventions relatives aux opérations de 2015, saluées par la classe politique unanime, n'ont pas déclenché de rivières de décorations significatives. Exemple parmi d'autres, pour le Bataclan, seuls trois personnels de la préfecture de police ont été singularisés. En off, on explique que le système est embouteillé par un très grand nombre de demandes de décorations, dont une bonne partie provient de personnels hors des unités spécialisées. Certes, la décoration n'est pas une fin en soi, et ce n'est pas un outil de la réussite d'une opération, mais la... traduction de la considération nationale envers ses serviteurs.
Défense
A la défense, on ne peut pas invoquer le manque de véhicules (blindés ou pas), mais la constitution de la garde nationale, décidée hier par le président, laisse beaucoup d'observateurs sceptiques (et pas que l'auteur de ce blog). Pour l'heure, le ressenti est plutôt celui d'un ripolinage des réserves, dont on sait déjà que les moyens en termes d'entraînement, d'équipement, et de budget pour payer les périodes, génère un fort scepticisme, de la part de beaucoup de réservistes des armées.
Lors d'un reportage en gendarmerie, de loin la réserve qui fonctionne le mieux, j'ai aussi pu voir l'insuffisance de moyens pour l'entraînement, face à l'afflux de candidats (un doigt pointé pour simuler le SIG 2022...). Des candidats qui se sont inscrits il y a... un an.
Les réserves ont été érigées en priorité présidentielle, il y a plus d'un an, mais les résultats de cette priorité restent néanmoins assez difficiles à discerner.
A l'autre bout du spectre, l'armée d'active conserve d'importants trous dans la raquette, des déficits capacitaires comme on dit (1). Drones, hélicoptères, avions de transport tactiques, le CEMA doit bâtir des opérations cohérentes, contre des groupes terroristes, au Sahel, et demain en Irak, avec des moyens comptés.

(1) il faut rappeler qu'actuellement, nulle part, les armées ne sont engagées dans des opérations de haute intensité, mais seulement contre des adversaires qualifiés d'asymétriques. On peut donc s'interroger sur l'efficacité (et la marge de manoeuvre) réelle qu'elles auraient contre un adversaire nettement mieux outillé que Daech en Irak, ou AQMI dans la BSS.

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